top of page

" Petits Polars Pour Les Amis "
Tome 1

"  C A R O L E  v2 "

Bien triste semaine.

15/12/2017 Jour de la mort de Jean D’ORMESSON

16/12/2017 Jour de la mort de Johnny HALLYDAY

17/12/2017 Jour de la mort de notre TAITA

CAROLE de Jean KUBLER POLAR 1ère de Couv

PROLOGUE :

« MISE EN BOUCHE »

 

   Karim MALIK est un « ex-jeune des quartiers » de Décines, proches de Lyon. Marocain d’origine, il est né en France et revendique chaque jour son appartenance à ce grand pays qui lui a permis de vivre, d’apprendre, de travailler et maintenant d’élever ses deux enfants, Assim, 14 ans et Naïma, 9 ans avec son épouse Monia 34 ans.

   A 36 ans il peut se venter d’avoir pas mal réussi tant sur le plan professionnel que social. Il est adjoint au responsable qualité dans l’entreprise Orangina à Meyzieu depuis 10 ans maintenant, et destiné à un bel avenir dans cette société ou pour le moins dans le domaine de la qualité. Sur le plan social, il a été élu en 2008 à la mairie de Décines et occupe le délicat poste d’adjoint à l’Environnement. C’est vous dire combien il est sensible à toute pollution ou à toute décharge sauvage et à tout ce qui peut poser un problème tendant à détruire le fragile équilibre environnemental de sa commune.

   Il arbore une belle barbe brune, parfaitement entretenue, non par conviction, mais parce que son épouse aime ça. Le traiter comme les autres barbus de Décines, serait une profonde méprise. Vu qu’il revendique fortement son indépendance, sa nationalité Française et sa distance envers les religions, quelqu’elles soient, qu’il catalogue d’obtus, d’obscurantistes et d’intolérantes.

   Ce Samedi matin, 16 Octobre 2010, comme souvent, vers 9 heures, Karim va faire son jogging le long du canal de Jonage en passant par le pont de Vaulx. Il rencontre plusieurs de ses collègues de la mairie, adeptes de footing et de grand air. Il traverse le Pont afin de rejoindre la berge d’en face et courir sur le chemin qui longe le canal, l’ex-chemin de halage.

   Personne, à part lui, n’aurait remarqué les auréoles laissées par des hydrocarbures dans les ajoncs et les abords du canal, là où le courant est quasiment inexistant, responsable de l’environnement oblige.

-  Encore un qui s’est débarrassé de son épave, pense-t-il tout haut.

Mais Karim est curieux, cette réponse, à l’emporte pièce, ne lui convient qu’à moitié.

   Il a croisé Paulo DUBREUIL tout à l’heure, il venait de par là.

-  Je vais appeler Paulo. Il est proche. Il va rapidement me rancarder sur cette pollution sauvage. En fait c’est son boulot d’agent des services techniques.

  • Allo!

  • Salut Paulo, c’est Karim, je suis sur les bords du canal au bout du pont, tu n’es pas trop loin?

  • Non, pas trop.

  • Viens me rejoindre, il y a un truc qui me chiffonne.

  • OK J’arrive !

  • Merci Paulo, je t’attends.

   Dix minutes se passent, Paulo apparaît, un poil essoufflé, en fait, il souffle comme un soufflet de forge, la bibine, c’est pas bon pour les sportifs du dimanche.

  • Salut Karim, t’as pas honte de faire courir comme un dératé un quinquagénaire bien tassé qui vise une retraite paisible. J’ai failli faire « une bronche épaulé-jeté » en entendant ce ton inquiet que je connais bien. Qu’est ce qui t’arrives? T’as croisé une bombe sexuelle et tu veux un solide alibi?

  • Déconnes pas Paulo, c’est ça qui me tracasse. Tu vois ces traces de Gazoil et d’huile en bordure de l’eau? Il y a une merde là dessous. Je veux en avoir le cœur net. Qu’en penses tu?

  • Ce n’était pas là, hier matin. Etant de repos, j’ai fait une balade tranquille avec mon chien. A l’allure où nous marchions, ça ne m’aurait pas échappé. Je suis sûr que ça date de cette nuit. La tache est un peu grosse pour être une moto. Je pense qu’il y a une bagnole, noyée, à quelques mètres du bord. Nous aux services techniques on ne peut pas faire grand chose, on a pas le matos nécessaire. Il faut appeler les pompiers?

  • Tu as raison, je les appelle. Reste avec moi si tu as le temps. On ne sera pas trop de deux pour localiser le problème.

  • Ok Karim, en heures sup bien entendu.

  • Rève toujours Paulo, c’est du bénévolat pur et dûr. Vu comme ça chauffe avec les lycéens depuis jeudi, j’ai bien peur que nos pompiers soient un peu occupés.

   Un dimanche matin, lendemain de manifestations graves dans les rues de Lyon, place Bellecour et place des Cordeliers, les pompiers, toujours en première ligne, ne voyant « pas de fumée à l’horizon », se sont décidés à montrer le bout de leur nez, une bonne demi heure après l’appel. Je ne leur en veux pas, ils ont été beaucoup sollicités ces jours. J’ai peur, que demain, la situation soit du même acadit. Karim les a accueilli dans un langage fleuri, mais modéré et sur le ton de la plaisanterie plutôt que sur le ton du reproche. Il ne sert à rien de mettre de l’huile sur le feu, si l’on peut dire. Comme c’est Monsieur l’Adjoint à l’Environnement qui cause, tout le monde se détend et les pompiers déploient, vite fait, leur matériel, canot de sauvetage, sondes et lunettes de vision sous l’eau, pendant que deux hommes grenouilles se préparent à une éventuelle plongée.

   Le résultat ne se fait pas attendre. Il y a bien un véhicule BMW par 3 mètres de fond, déjà couvert de vase. Nos deux grenouilles (pas de bénitiers celles là) « s’envoient dans l’eau » (pas en l’air comme certains mauvais esprits pourraient le penser), afin de fixer la manille du cable de traction qui n’avait pas manqué d’être préparé. Gilbert et Michel, nos grenouilles, jettent un œil dans le véhicule et reculent d’effroi en découvrant un homme et une femme petitement vétus, attachés par les poignets à la ceinture de sécurité, yeux exhorbités et bouches ouvertes, dans un appel d’oxygène qui a, pour le moins, passablement tardé à venir.

   L’ambiance s’est de suite refroidie, déjà que l’eau du canal n’est pas réputée pour être le bain favori des Piranhas (environ 30°). Cette découverte est l’annonce d’une montagne d’emmerdements à venir, à commencer par la flicaille qui se pointe déjà, alertée par Karim lui-même.

   La gente poulagat fait son boulot, très professionnellement.

 

   Pas de papier, bien entendu, pas de signe distinctif, ça va de soit, pas de plaques minéralogiques sur le véhicule, pour couronner le tout.

   C’est le Lieutenant Daniel LEMOINE, OPJ à l’Hotel de Police Marius Berliet qui est de service ce dimanche matin accompagné de son équipière préférée Joce PRAL.

   La scientifique arrive vers 11 heures et pratique, relevés, mesures et photos d’usage.

   La BMW s’avère être une 325Ix Coupée noire. Elle est maintenant au sec, et ses occupants allongés dans un sac plastique qui va les conduire directement à l’institut médico légal de Lyon via le Pimpom de l’ambulance.

   De retour à l’Hotel de police, le Lieutenant Daniel LEMOINE et le Sergent Joce PRAL ouvrent une procédure pour double meurtre, en attendant de re-qualifier cet acte en assassinat, suivant les circonstances, sans préméditation ou avec. Dans ce cas il semble que le double assassinat est quasiment établi. Difficile de penser que cet acte sauvage soit fortuit et non planifié. Un minimum de préparations semble indispensable pour réaliser un tel scénario.

   Les photos prises par la scientifique sont passées d’urgence aux fichiers trombinoscopiques de la Police et croisées avec les fichiers d’INTERPOL, le voisin en situation géographique.

   Le Lieutenant LEMOINE a de suite reconnu l’homme et l’a rapidement identifié comme étant Teddy NOURICEAU, 35 ans, petite frappe, proche du milieu Lyonnais, anciennement noyauté par « le gang des ferrailleurs ». (Voir doc.) 

   Teddy est bien connu des services de Police. Il est propriétaire d’un bar à putes dans le vieux Lyon, quartier de St Jean, le FOX BAR avec Damien KALLER Commercial et Jean Claude BOULARD, sans profession vraiment reconnue et plus ou moins homo.

   Le FOX BAR est sous surveillance depuis deux mois. C’est semble-t-il la plaque tournante d’un trafic malsain et le repaire d’une montagne de « beau monde ».

   Teddy est aussi gérant, pour des gros bonnets, dont son père, du CELTY’S.

   Ce bar Ecossais situé au bout de la rue du Bas d’Argent, proche du Quai Jean Moulin est renommé pour la qualité de ses Whiskys, plus prestigieux les uns que les autres. Du GLENVILET 15 ans d’âge, léger, à l’ARDBERG 18 ans, très tourbé, du DALMORE 30 ans d’âge, Moelleux au BOWMORE 25 ans d’âge, Intense et ambré, vous avez toutes les facettes de l’Ecosse. William vous reçoit en Kilt, (en fin de soirée c'est plutôt Kilt ou Double ...) très couleur locale, c’est vrai qu’il est natif de Clermont Ferrand, où se trouve le fief des Ecossais de France, c’est bien connu !!!

   Pour revenir à nos moutons, galeux en fait, ces deux établissements sont renommés dans nos services pour les filles et le trafic de drogue, sans être inquiétés le moins du monde, les connaissances ça aide, jusqu’à un certain point …

   Bien ! Convenons que Teddy n’est pas une grosse perte pour l’humanité. Mais la nana qu’il a entrainé dans sa mort, c’est qui ?

   INTERPOL répondra à cette question délicate dans la journée. La réponse s’avère tout aussi délicate à manipuler :

   Bérénice HOLTIER Lieutenant de Gendarmerie, Brigade des Stupéfiants, en mission d’infiltration depuis trois mois, dans les fameux milieux Lyonnais.

   La Gendarmerie va vilainement faire la gueule. Une récupération du dossier est à prévoir, ce qui ne fait pas les affaires de notre OPJ de service, vu qu’il a fait le lien avec les dossiers en cours à l'Hotel de Police.

   Super, bel exemple de communication entre les différents services de l’Etat, pour le moment une morte, qui dit mieux.

   Un gros nuage noir couvre le ciel de ce Samedi soir, et cette affaire va semer, un peu plus, la pagaille dans la région, alors que l’ambiance est déjà explosive.

   Pour un peu, ce double assassinat passait inaperçu.

   Beaucoup trop occupé par les événements, les forces de l’ordre avaient d’autres chiens à fouetter, et Teddy n’allait pas faire pleurer dans les chaumières.

   Mais Bérénice ? Au mauvais endroit, au mauvais moment, ou bien ?

 

(Doc à voir « Piège pour un Gône » de Jean-Renaud GROISSON aux éditions Alain Lefeuvre, ouvrage longtemps interdit et très instructif sur les combines mafio-politiques de l’époque, dont il doit bien rester quelques séquelles). (Tous droits réservés)

CHAPITRE 1

« LE PROBLEME DE CAROLE »

Mercredi 16 Juin 2010

  Quatre mois avant l’épisode du pont de Vaulx, le Mercredi 16 Juin 2010 vers 22 Heures 30, pour être précis, Carole est sur la route du retour. Pas tranquille du tout qu’elle est la bergère. Il faut dire qu’elle a suffisament fait de sales coups à ses congénères pour s’inquiéter sèrieusement. Tout se paye un jour ou l’autre …

 

  • Mais qu’est ce qu’il me veut celui-là ?

  Ça fait 15 bornes qu’il me suit. J’en ai raz la casquette. Je m’en vais te lui en jouer une dont il est pas prêt de se remettre.

  C’est d’ac, J’aurais du mal à jouer la vierge effarouchée. Vu ma tronche, ma taille, tant en hauteur qu’en largeur, s’il en veut, c’est OK, sans condition, c’est pas tous les jours qu’on rencontre un branque. Cela dit, je flippe un poil. Je ne pense pas que ma vertu soit en danger, mais plutôt ma carcasse.

  Depuis CHARVIEU ce type me suce le parechoc. J’ai un peu tourné en rond pour le paumer, mais voilà, il s’accroche. D’un coté j’aimerais en avoir le cœur net et d’un autre, j’ai la trouille.

  Qui ça pourrait bien être ?

  Pas mal de gens peuvent légitimement m’en vouloir. J’ai été assez garce avec pas mal de connards, mais en fait ils ont tous bien cherché les emmerdements que je leur ai servi tout frais.

  Tient il n’est plus derrière.

  Ce n’était peut-être qu’une mauvaise plaisanterie.

  Mais 3 fois cette semaine ça commence à faire.

 

  Il faut que je vous dise, ma vie est un vrai paquet de merde. Depuis ma naissance, tout ce que je fais ça tourne au vinaigre. J’ai pas eu non plus que de bons exemples à suivre, de loin s’en faut. Ma mère recevait régulièrement, entre deux cuites, pour oublier les misères de ce monde et plus précisément mon père le roi du cheval et de la jument énamourée et champion de la bête a deux dos dans le privé. Lorsque d’aventure il gagnait un peu avec l’un il allait vite le bouffer avec l’autre. Il faut toujours rendre à César ce qui appartient à César et à la morue ce qui appartient au hareng. Ça fait un peu cliché de banlieue noire, désolée, mais c’est dans la banlieue merdique de LYON que je suis née. C’est là que de mon 8éme étage, depuis que je peux voir par la fenêtre, j’observe des oiseaux de mauvaises augures, qui,  pour faire leur nid, transportent et trafiquent une drôle de paille.

  Ho! On se fait à tout, et tout est bon, pour celui qui a presque rien. Alors je trafique aussi depuis mes 10ans. Là, le premier pet tiré sur le joint de mon grand frère a ouvert le chemin aux combines de tous poils.

  J’aurai 22 ans dans peu de temps : le 17 mars prochain. Je suis du signe du poisson. Ma mère dit toujours « tu nages en eaux troubles ma fille ». Ce serait plutôt « Tu nages dans les égouts, ma fille ». Allez!  il faut faire avec. J’ai fait des petits boulots tantôt bien, tantôt moins bien, mais dans l’ensemble, jusqu’à présent ça roule pour moi. J’ai pu me payer cette bagnole qui fait marrer tout le monde. Pensez ! une Fiat Panda 4x4. Je voulais une Fiat 500, le pot de YAOURT, mais en l’essayant j’ai failli rester coincée dedans. Ca a donné l’occasion au vendeur de tâter de la grosse à loisir. Je lui ai servi mon plus beau râtelier de 32 ratiches  dans la force de l‘âge, prête à le bouffer tout cru. Il n’a pas demandé son reste le lascar.

  J’ai bossé dans une petite boîte d’électronique. Je posais des petits composants sur des circuits imprimés, ce pendant 6 mois. Ça payait bien mais les tronches des bonnes femmes qui m’entouraient m’ont rapidement gonflées force 7. Que de conneries j’ai pu entendre. Quand je pense que certaines sont là depuis 5 voir 10 ans, que leur avenir c’est torcher les gosses le soir en rentrant du boulot dans l’allégresse familiale et le dimanche faire le tour du lac de Miribel – Jonage au milieu des prolos et des Tchongs. Vous n’avez jamais vu ça ? Ça paye ! Vous passez sans transition de la saucisse de Strasbourg au poulet laqué, du Couscous aux moules-frittes. Ça vous bouscule les papilles et les tripes, même si la mode de Caen n’est pas de sortie ce jour là. Pour se plonger dans la populace, je vous conseille le détour.

  J’ai donc changé de crémerie, sans regret. Ma mère, me dit souvent qu’il vaut mieux avoir des remords que des regrets. J’aurai peu de regrets car j’ai déjà pas mal essayé … J’ai par contre quelques remords.

  Je ne serais pas étonnée que cette andouille qui m’a suivit en face parti.

 

  Je ne suis plus très loin. Je vois le panneau indiquant l’entrée de VAULX en VELIN. Dans 10 minutes maxi je serai à la maison, enfin au 8 éme étage de mon gourbi de béton.

  Ce soir j’ai eu peur. Il s’est rapproché un peu trop prêt. Il ne faut pas que ça dure.

  Je vais craquer.

  J’ai essayé de reconnaître sa bouille, mais il fait sombre à cette heure là ce 16 Juin. Même la bagnole ne me dit rien. C’est une vielle Mercos. Si il veut jouer à pousse pousse, j’ai aucune chance, et je pense qu’il y a bien d’autres méthodes pour s’envoyer en l’air.

  Ça y est, j’y suis, c’est pas dommage.

  Rarement le trajet CHARVIEU-VAULX en VELIN m’a paru aussi long. Il faut que j’en ai le cœur net.

  • Salut, t’as eu des coups de turlu pour moi ?

  • Non, pas aujourd’hui. Ha si! Un, Mais y avait personne au bout du fil, ça respirait assez fort de l’autre coté, mais pas un mot. Encore un désespéré de la quequette que tu as déçu …

  • Je te remercie, mais pas mal en redemande

  • Et beaucoup plus se barrent !

  • Qu’est ce que tu veux, je ne suis pas si experte que toi. Tu sais, les voisins disent que tu n’en as jamais cassé, mais beaucoup tordu. Il paraît que tu seras dans le livre des records l’année prochaine, génial, je vois le tableau. Les copines vont venir te demander une formation accélérée. On parle même de te prendre comme prof. de pratique pour le BTS de salope en alternance chez DUREX SA.

  • N’empêche qu’être jalouse de sa mère c’est pas bien. A part des vacheries qu’as-tu fait pour rentrer si tard ?

  • Un enfoiré me suit depuis 3 jours. Chaque jour il se rapproche un peu plus dans les encombrements, aux feux rouges. J’ai pas pu voir qui c’était. Maman j’ai la trouille.

  • Qu’est ce que tu veux qui t’arrive?

  • Je ne sais pas encore. Et qu’en je le saurai, j’ai peur qu’il soit trop tard. C’est un malade. Plus j’y pense plus j’ai vraiment la trouille.

  • Viens faire la bouffe ça te changera. Fais pour 4 ton frère Damien vient ce soir. Il y a des spaghettis et de la Bolognaise dans le placard.

 

  Je ne peux pas m’empêcher d’y penser, mais mon premier patron m’a certainement maudite lorsque je me suis barrée. Car pour le remercier du boulot merdique qu’il nous donnait et des conditions difficiles dans lesquelles nous bossions, je lui ai foutu l’Inspection du Travail aux fesses par lettre anonyme bien entendu. Mais je suis sure qu’il sait que c’est à moi qu’il doit cette visite. N’ayant jamais revu qui que ce soit de cette boîte, je n’ai pas pu savourer ma vengeance. Il pourrait bien être mon suiveur, bien que tout cela date de 3 ans.

 

  Il en est de même pour mon deuxième patron. Pour ça, il était cool. Un peu trop cool même. Pas souvent là, il nous laissait ma copine et moi la charge du magasin de vêtements qu’il possédait dans la rue principale de BRON. Seule sa fille venait nous les briser de temps à autres. Quand ils étaient là l’un ou l’autre, ça minaudait gros. Ca faisait la demoiselle ou le Monsieur bon chic bon genre devant les rombières des alentours, flattant par ci la femme du commandant de Gendarmerie et par là la maîtresse d’un ex-taulard devenu gérant de boîte de nuit. Plus tu pettes dans la soie moins il faut donner dans la dentelle. Pas regardant qu’ils étaient ces vachards, sauf avec nous.

  Alors on avait monté une petite combine avec Pascale.

  Le stock ne pouvait pas être en permanence évalué au quart de poil, et personne ne savait précisément ce qui restait en rayon. Toutes les 10 ou 12 pièces celle qui suivait était pour nous. Pour les fins de mois qui commençaient vers le 10 c’était super. Ca a duré pendant presque un an. Puis un jour ils nous sont tombés dessus sans crier gare. Le comptable trouvait les bénéfices bien moyens, et pour cause. Entre midi et 2 heures trente, heure à laquelle nous rouvrions le bouclard, ces branques avaient tout fouillé et retourné tous les tiroirs. Immanquablement ils sont tombés sur mon agenda où j’avais comme une conne laissé 200 boules en espèces. C’était devenu tellement facile et habituel qu’on ne prenait même plus de précaution.

L’habitude …

  Ils n’ont pas appelés les flics, vu qu’ils en faisaient autant. On s’est retrouvé à la porte en moins de deux. Avec un certificat de travail à foutre une gastro-entérite à un chinois. (je dis ça parce que pour eux c’est pas gagné la gastro, avec tout le riz qu’ils bouffent)

Le contrôle fiscal  qu’un copain de ma mère leur a gratiné, les a mis hors jeu. Là je sais qu’ils savent, car j’en ai fait la menace en me cassant. Le Gérard en question et sa Julie de fille pourraient bien essayer de me réduire en miettes. Ce ne serait qu’un prêté pour un … rendu.   

 

  J’ai passé une drôle de nuit à broyer tous ces souvenirs.

  Le repas, sans surprise, est resté en travers.

  Pas de rêves érotiques ce soir, mais des fantômes, des visages du passé, de l’eau trouble et sale dans laquelle je tombe après avoir été projetée par dessus la rambarde d’un pont quelconque.

  Le fond de l’air est frais, le fond de l’eau aussi, voir glacial.

  Je me réveille d’un bon, l’esprit en vrac et les idées noires.

  J’ai une tonne de merde dans les yeux, la tête dans le sceau et une humeur à foutre en rogne mon ange gardien.

  Pauvre mec, avec moi, t’as vachement de boulot mon pote.

COMMENTAIRE Editions BAUDELAIRE

Un texte résolument moderne mais qui ne tombe pas dans le piège de la facilité linguistique.

Un « polar » qui ne brade pas la langue française au profit de l’intrigue seule. Très bien ficelé, il tient le lecteur de bout en bout.

Vous avez un style atypique, très imagé. Vous embarquez tout de suite le lecteur dans votre récit. Dès les premières pages, l’histoire accroche, les personnages sont fouillés, le style est maitrisé. Il n’y a rien de plus frustrant que les auteurs qui s’aventurent dans un récit mais qui ne parviennent pas à emmener le lecteur avec eux. Vous, c’est tout l’inverse. 

Il faut dire que l’environnement de notre CAROLE est pour le moins tourmenté. Elle rencontre, par hasard son destin et peine à se dégager des trafics de ses petits camarades. Puis l’aura lumineux de Bérénice déteint sur Teddy, patron de deux bars louches, objets de toute l’attention de nos deux petits flics obstinés Joce et Daniel. Mais voilà …

Ces deux CHAPITRES POUR VOUS METTRE EN BOUCHE, BONNE LECTURE avec CAROLE v2

bottom of page